Dercky Bombil ré-anoblit la rumba congolaise avec Malage et Jossart

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Vous qui êtes mes contemporains et me lisez, si d’aventure le Bon Dieu prolongeait notre bail et nous laissait ainsi conter le Congo à nos petits-enfants et arrières petits-enfants, vidés de notre vigueur physique et sans doute avec une mémoire en  configuration gruyère, c’est sûr que ce n’est pas de Joseph Kabila, de la grand-mère de Bitakwira, de Mishiki ou de Mende qu’ils voudraient qu’on leur parle. La rumba congolaise sera ce marqueur de l’apport culturel de la RDC au patrimoine mondial dont ils voudraient s’imprégner. À défaut de leur faire un compte-rendu  exhaustif, les chansons Mizena et Mobembo de Dercky Bombil seraient de pertinentes évocations illustratives de cette musique.  Celle qui irait de l’ancêtre Wendo en passant par Tabu Ley, Franco, Los Nickelos,  Bella Bella  jusqu’à Zaïko Langa Langa, juste avant un presque vide sidéral.

Le phrasé de ces deux chansons  l’emprunte à l’école fiesta particulièrement à l’écriture de Tabu  Ley. Les phrases sont moins nerveuses et privilégient la limpidité tout en irriguant la chanson avec des mélodies berçantes parfois mélancoliques. Même si on ne comprend pas le lingala utilisé dans ces chansons, dans Mobembo les mélodies et la musique expriment le double sentiment de la mélancolie due à l’absence de l’être aimé et de la saudade, ce mal du pays, quand on se rend compte qu’on va finalement faire sa vie ailleurs. À défaut de retrouver l’amour rêvé ou de reconquérir la personne de sa vie, on pense à  retrouver sa terre natale, les terres de son enfance, de sa jeunesse.

Lutumba Simaro avait Sam Mangwana, Dercky a trouvé Malage

Né et grandi entre la rive droite du fleuve Congo et la rive gauche de la rivière Tshopo à Kisangani, Dercky s’est très vite montré doué à la guitare. Investi dans ses études en médecine, ce médecin qui exerce à Bruxelles a gardé intacte sa passion et conservé précieusement le cahier dans lequel il couchait les textes de ses chansons.

Lutumba Simaro, meilleur auteur de la musique congolaise, est réputé pour s’attacher à un interprète fétiche. Sam Mangwana était celui qui sublimait ses chansons avant qu’il ne s’envole sous d’autres cieux, le temps pour Simaro de faire briller tour à  tour Djo Mpoyi, Carlyto et Malage. De la même manière, le dernier cité, Malage de Lugendo est la voix des chansons de Dercky Bombil. Le chanteur s’y exprime  avec justesse et avec la même voix cristalline qui avait jadis fait le bonheur des orchestres OK Jazz et Zaïko Langa Langa. La chanson Mobembo en fournit une belle illustration; Mizena également avec cette pure merveille que produit la complémentarité avec Jossart Nyoka Longo, Malage de Lugendo et Thylon.

À l’écoute de certaines chansons de Dercky, les mélomanes retrouvent des airs, des mélodies et des riffs qui rappellent Zaïko Langa Langa ou  encore la guitare de Luambo, une belle inspiration car le talent en musique tient au fait de réussir l’exceptionnel avec les canons d’une école, d’un style établis. Sans doute le plus grand chanteur, auteur et compositeur de la musique congolaise, Tabu Ley ne réinventait pas la  rumba à chacun de ses disques : il brillait dans le style qu’on lui connaissait. C’est le fil rouge de la rumba congolaise que propose Dercky Fataki Bombil. À découvrir.|Botowamungu Kalome (AEM)

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