Denise Nyakeru flambe avec l’argent de sa fondation

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C’est un peu l’histoire d’un père de famille qui obtient de ses proches de l’aide pour la scolarité, les soins de santé et les repas de ses enfants et qui en use pour permettre à sa maîtresse de payer ses arriérés de tontine et de refaire sa trousse de maquillage. Alors que sa Fondation Denise Nyakeru fonctionne grâce à des subventions et des dons à hauteur de 85 %, la première dame de la République Démocratique du Congo s’est autorisée un écart, une sorte de coquetterie, en remettant aux journalistes 100.000 dollars pour l’organisation d’un congrès très controversé de leur corporation. Près de 5 % du budget pour une dépense sans aucun lien avec l’objet de la fondation. Juste avant, elle a financé le déplacement et le séjour en France de plusieurs personnes pour assurer l’escorte d’une dizaine d’étudiants congolais bénéficiaires des bourses du gouvernement français comme si les pauvres n’allaient pas savoir comment prendre le métro ou comment se rendre à leurs universités.

 

Les champs d’action de la fondation Denise Nyakeru sont clairement délimités : la santé, l’éducation, l’autonomisation des femmes et la lutte contre les violences basées sur le genre. Par quel miracle alors le congrès des journalistes s’est-il mué en une urgence au point de capter près de 100.000 dollars ? Le processus de la décision d’attribuer cette subvention est encore plus étonnant par sa rapidité et par sa légèreté car même un distributeur de billets de banque marque un temps de réflexion avant de sortir l’argent même si ton compte est créditeur et le code bon. Jugez-en  à travers le récit du journaliste qui a joué au courtier :

 

« Par la grâce de Dieu, je rencontre, entouré de quelques amis, la Distinguée Première Dame, Denise Nyakeru Tshisekedi, Présidente d’une Fondation qui porte son nom. Je prends mon courage pour lui dire :

– Maman, notre mandat au niveau du Comité de l’UNPC a expiré depuis 2018.

– Pourquoi ?

– Nous n’avons pas de moyens pour organiser le Congrès. Le tout dernier congrès a été organisé avec le financement à titre individuel de l’ancien Premier Ministre, Augustin Matata Ponyo.

– Avec quel montant ?

Sans réfléchir, je réagis, me fondant sur la plainte de Fidèle Musangu :

– 100.000$

– Je ne saurai pas donner tout le montant. Je vais contribuer avec ce que j’aurai. (…)

Deux jours plus tard, le Bureau de Sa Distinguée Première Dame invite le Président de l’Union. Un projet de budget lui est demandé. Très vite il le dépose. (…) Le Bureau de la Première accepte de parrainer le Congrès »

Une question d’orthodoxie et de bon sens

Ce « don » fait à la corporation des journalistes révèle un problème de gouvernance dans la gestion de Denise Nyakeru. Comme toutes les autres associations sans but lucratif (ASBL) et les organisations non-gouvernementales (ONG), les décisions de cette fondation doivent être un minimum collégiales et soumises tout au moins aux observations des instances dirigeantes à défaut de requérir leur validation. L’accord donné instantanément pour dépenser près de 5 % du budget est symptomatique de la mentalité « Mama sociale » ou slogan « Apesa atala te ». C’est ainsi que quand le journaliste lui dit qu’il leur manque de l’argent pour organiser le congrès, l’épouse de Félix Tshisekedi ne pose même pas la question de savoir pourquoi le ministère de l’information n’apporte pas son aide, à la place elle va donner du « je » : « Je ne saurai pas donner tout le montant. Je vais contribuer avec ce que j’aurai. ». Quand l’argent te brûle les doigts, tu ne t’épuises pas à analyser les demandes d’aide.

Enfin, il y a une question de bon sens : peut-on recueillir des dons destinés à aider les couches les plus fragilisées de la société dans les domaines de la santé, de la formation et de la lutte contre les violences et en détourner près de 5 % pour financer les élections d’une association dont les dirigeants ont choisi d’alourdir la facture en la prévoyant dans une station balnéaire ?

Dans un récent article, nous avions relevé que Denise Nyakeru s’éparpillait dans ses actions, elle pourrait finir par s’égarer et par caricaturer ses engagements humanitaires.|Botowamungu Kalome(AEM)