
B ravant la terreur que faisait régner un tyran sur son peuple, une femme osa le défier avec une invective qui le laissa coi, comme subitement vidé de sa puissance, de son pouvoir : « Es-tu né d’une mère ? ». Comme si le simple fait de naître d’une mère, un néologisme africain pour sublimer le rôle de la mère, faisait de nous tous forcément des gens droits. Cela se passait dans un roman signé par un de ses auteurs africains qui savaient si bien magnifier la culture du bien, du sens de l’intérêt général comme émanation naturelle de l’éducation qu’on reçoit d’une mère africaine. En 1990, une rumeur avait circulé à Kinshasa selon laquelle un père qui n’avait pu faire soigner son fils qui est mort, était allé sur la tombe de Mama Yemo la supplier de venir chercher son fils Mobutu qui faisait souffrir le peuple. Parce qu’aucune mère africaine n’accepterait que son fils soit le bourreau de toute une nation.
Certains diront qu’il s’agit là d’une façon d’idéaliser l’Afrique comme pour s’accrocher au seul élément positif que « ses » enfants peuvent revendiquer aujourd’hui. Évidemment, cette vénération d’une certaine Afrique peut paraître simpliste. Mais la lecture depuis la semaine dernière, sur Afriqu’Échos Magazine (AEM), des interviews réalisées au « Congrès international de la femme noire » crédibilise ce regard religieux que les Africains portent sur la mère. À travers ces articles, Hélène Ashen Fuemba, rescapée du crash du DC 9 à Goma donne une leçon d’humanisme et d’héroïsme dont seraient capables très peu de gens. J’ai envie de dire seule une femme est capable d’une telle humanité : amenée à l’hôpital après le crash, très peu de temps après, elle s’est mise à la disposition de l’hôpital portant secours aux autres accidentés. À Mahagi où elle vit, avec d’autres femmes, elles font la médiation entre deux ethnies qui s’extirpaient, il y a encore peu, par leurs armes, et avec réussite plutôt.
Une autre illustration : Jacky Ekongo, femme de ménage de son état en France qui, un jour retourne en RDC et qui, avec ses économies, lance une ONG pour assister les jeunes de la rue. Plus tard, c’est sa rémunération de députée qui financera son ONG. Pendant que l’école privée est une affaire juteuse à Kinshasa, elle en crée une où elle scolarise gratuitement des jeunes de la rue sans aide, sans subvention.
Certains disent que la femme est l’avenir de l’homme, du monde ; je dirais, quant à moi, qu’elle est surtout un miroir impitoyable pour l’homme, pire encore pour l’homme politique. Pour ces deux exemples d’humanité et de don de soi, donnés par ces femmes, je dis simplement : « Femme je te vénère » |Botowamungu Kalome (AEM)