Dans une prêche relayée sur vidéo dans les réseaux sociaux, rageux le pasteur congolais Marcello Tunasi a rapporté « une conversation avec le Bon Dieu », un échange axé sur « l’esprit qu’il y avait derrière Papa Wemba » et qui a fait des Congolais des sapeurs qui s’habillent trop cher alors qu’ils n’ont rien, qu’ils ne sont rien. Chemin faisant, ce « relais du Bon Dieu » a dénoncé « l’achat à 1.000 dollars des iPhone », curieux goût du luxe pour des gens pauvres. Bientôt Marcello va déclarer que le royaume des cieux appartiendrait à ceux qui ne peuvent s’offrir un iPhone. À soutenir qu’une marque de smartphone est un objet de distinction sociale, on flirte avec la condescendance. Un iPhone, comme les autres marques, est justement destiné à faire sauter des diverses entraves qui créent des enclos hermétiques de la pauvreté.
Personne ne naît pauvre mais beaucoup naissent dans des familles aux conditions matérielles très modestes, parfois dans le dénuement carrément. Avoir ne fût-ce qu’un repas par jour relève d’un défi quotidien, de même l’accès à une bonne instruction et à la culture est un objectif inaccessible. Le pays compte énormément des foyers où un livre n’est jamais entré, où un poste de radio n’a jamais résidé et avec des enfants qui se contentaient de regarder la télé derrière les rideaux des fenêtres des maisons des voisins mieux lotis. Le téléphone ? Il y en avait un ou pas du tout par quartier. Pour annoncer les décès par télégramme ou par phonie aux familles on allait à la poste ou dans les missions catholiques…
Puis est survenu l’avènement couplé du numérique et du smartphone. Dans ce téléphone portable étaient désormais réunis : une bibliothèque avec des millions de livres et de disques dans tous les genres, le téléphone, l’ordinateur, l’appareil photo, un album photo, la caméra, des logiciels de montage de son et vidéo, le magnétophone, le baladeur (Walkman), le magnétoscope, le télégramme, la phonie, le Fax, des milliers de radios et des chaînes de télévision, des enseignements dans tous les domaines… Sans oublier la possibilité de s’initier à des métiers ou des activités rémunératrices via des tutoriels gratuits et pour le petit artisan ou l’artiste peintre qui va passer d’une table au coin de sa rue pour tout comme étal à une exposition planétaire via le smartphone… Le tout moyennant un abonnement pour toutes les bourses. Le smartphone paraît dès lors comme un outil d’égalisation des chances par cet accès facilité à la formation et à la culture pour échapper à la pauvreté.
J’entends d’ici Marcello Tunasi rugir comme un rocker : « Mais des smartphones qui coûtent dix fois plus cher peuvent faire l’affaire ». Sauf que la qualité, la robustesse et la performance ont un prix. Si on veut réaliser des montages vidéo de bonne facture ou léguer un album de famille avec des photos et des vidéos de qualité qui le restent cent ans plus tard, cela vaudrait bien l’achat d’un smartphone haut de gamme. Les pauvres qui détiennent ces appareils haut de gamme friment ? Ça ne dérangeait pourtant personne quand les riches d’hier posaient à côté de leurs téléviseurs ou de leurs véhicules.
Du bon usage de la chaire et du smartphone haut de gamme