
C
e samedi 7 août 2010, au festival Les Escales de Saint-Nazaire (50 km de Nantes, en France), le public était venu voir une star d’aura internationale, mais Salif Keita, le chanteur à la voix cristalline, s’est mué juste en un pourvoyeur d’une musique d’excellence qui se suffit à elle-même pour faire le bonheur des mélomanes. Talent ou humilité ? Sans doute les deux, car d’entrée de jeu, c’est à genoux qu’il salue le public à son arrivée sur scène. Quand il commence son tour de chant, même si sa voix qui porte transperce l’air marin qui arrive des côtes de l’Atlantique qui sont à 50 mètres de la scène, même si son chant se révèle d’emblée irrésistible, Salif Keita va concéder la vedette à la musique. Comme un hommage aux talentueux musiciens qui l’accompagnent et comme certain qu’il n’avait pas besoin d’en rajouter.
De blanc vêtu, pantalon et chemise manches courtes en lin, baskets aux pieds, coiffé d’une sorte de béret orné de trois cauris, Salif Keita se déplace et esquisse des tout petits pas de danse avec une nonchalance qui contraste avec la touche tantôt entraînante tantôt euphorisante de sa musique. Deux fois seulement, comme pris soudain par un feu intérieur, le chanteur se mit à bondir énergiquement pour ensuite replonger, comme si de rien n’était, dans une forme de sérénité presque bouddhique.
À l’extrême droite de la salle, deux choristes, deux superbes créatures vêtues en blanc également, accompagnent idéalement le chanteur et enchaînent des chorégraphies synchronisées à la perfection. Un guitariste au physique élancé drapé dans un long boubou blanc se charge de faire le show . Il parcourt toute la scène et quand il se dresse face au public, il donne libre cours à son doigté, magique ! Un solo de la kora va faire passer de l’émotion parmi les milliers de spectateurs : l’instrument dans le dos, puis couché sur le dos et rampant à même le sol, le musicien épate.
Finalement, en se mettant en retrait par savoir-faire et par savoir-être, Salif Keita a ramené tout le monde à l’essentiel : la musique, sa musique, mais aussi à la démonstration que l’aura d’une star est une construction collective. La sienne en est sortie désarçonnante et renforcée.|Botowamungu Kalome (AEM)